En cette année 2015, personne ne semble plus surpris, en lisant les journaux et les magazines ou en regardant la télévision, d’apprendre que le monde fonce droit vers une véritable pandémie de diabète. En particulier, le diabète de type 2, jadis appelé diabète de vieillesse. Maintenant que de jeunes adultes obèses et même des adolescents sont plus souvent touchés par la maladie, l’OMS elle-même se penche également sur le problème. Parmi les maladies chroniques, le diabète, qui touche en Asie plus de 10% de la population, se classe peu à peu dans les principales causes de décès au niveau mondial.
Une situation bien différente du milieu du 20e siècle. Certes, la maladie était connue, mais elle se manifestait principalement sous forme de diabète juvénile, appelé aujourd’hui diabète de type 1. Elle touchait principalement de jeunes enfants et de jeunes adultes et le traitement insulinique peu confortable qu’elle nécessitait était la cause de bon nombre de problèmes pratiques et financiers. Rendue possible à partir des années 1920 seulement, l’utilisation de l’insuline s’affichait comme seul traitement possible pour accompagner les prescriptions alimentaires. A cette époque, toute l’attention se concentrait alors sur les aspects pratiques du traitement insulinique et l’adaptation de l’alimentation. Une attention qui était alors aux seules mains des médecins, même si leurs connaissances et leur approche en la matière n’étaient pas optimales. En 1916, alors que l’insuline n’était pas encore disponible, le médecin américain E.P. Joslin fit jaillir une lueur d’espoir en insistant pour accorder de l’attention à l’accompagnement et à l’éducation du patient diabétique, des thèmes dont il fit son fer de lance à partir de 1935. La Belgique connut un tournant important au début de la deuxième guerre mondiale. Sous l’occupation allemande, la crainte naquit que la Belgique ne manque de ravitaillement d’insuline et que la pénurie de vivres entraîne une catastrophe pour les personnes souffrant de diabète. Sous l’impulsion du Prof. J.P. Hoet, quelques médecins décidèrent en 1941 de fonder une association qui serait responsable d’assurer les deux besoins. Elle fut baptisée ‘Association pour la défense des intérêts des personnes diabétiques’. Cette association assura ainsi la distribution de l’insuline et veilla à échanger les tickets de rationnement de denrées alimentaires pour les diabétiques contre une alimentation plus adaptée. Après la guerre, l’association continua son rôle d’information auprès de toute personne souffrant de diabète. En 1950, elle fut rebaptisée en A.B.D. (Association Belge du Diabète – Algemene Belgische Diabetesbond). Petit à petit, des deux côtés de la frontière linguistique, un consensus se fit que les intérêts des personnes souffrant de diabète seraient mieux servis avec deux structures séparées. Il était ainsi mieux possible d’atteindre son groupe linguistique. Pour les questions nationales et fédérales pour lesquelles les négociations avec les autorités étaient nécessaires, les deux parties continuaient à collaborer. Le pan francophone conserva la dénomination d’origine ABD. La structure flamande prit le nom de ‘Belgische Vereniging voor Suikerzieken’ (B.V.S.). Elle démarra officiellement en 1972 avec 2100 membres. Son siège était situé à Gand et elle publiait un périodique intitulé ‘BVS-Nieuws’. La BVS se décentralisa assez rapidement afin de pouvoir atteindre les patients diabétiques du Nord du pays au sein même de leur région. C’est ainsi que l’on compte aujourd’hui 25 sections locales, réparties dans les cinq provinces flamandes. Elles sont responsables d’informer, d’accompagner et d’offrir un soutien social à leurs quelque 21000 membres, soit dix fois plus qu’au début. Cette croissance a notamment été favorisée par l’évolution dans la prise en charge et les possibilités de traitement des personnes atteintes de diabète. Il en a résulté des activités importantes telles que la vente de seringues à insuline jetables, de bandelettes de test d’urine, de bandelettes d’analyse sanguine, par la suite également de glucomètres et de stylos à insuline, la publication de nombreuses brochures informatives; la participation au programme télévisé ‘Leven met suikerziekte’ (Vivre avec le diabète) présenté à la BRT; l’organisation de camps de vacances pour les jeunes, mais aussi de voyages culturels et de vacances à vélo pour les adultes. Depuis la création de la convention INAMI pour le diabète de type 1 en 1987, chaque année, un programme de formation est organisé à l’intention des infirmier/ières, diététicien(ne)s et podologues afin qu’ils puissent devenir des éducateurs en matière de diabète. Cette formation est considérée comme un jalon important dans le soutien et l’accompagnement des personnes souffrant de diabète, en collaboration avec les médecins. Le succès croissant rencontré a conduit à déléguer par la suite cette formation à quelques hautes écoles.
Dans les années 90, le diabète connut une véritable explosion. Le passage de l’insuline d’une concentration de 40 E/ml à celle de 100 E/ml en 1991, la première Journée Mondiale du Diabète, organisée en 1991 à l’initiative de la Fédération internationale du Diabète et de l’OMS, la déclaration d’intention européenne Saint-Vincent pour une meilleure prise en charge du diabète ou encore la publication de l’étude DCCT relative au besoin d’un traitement intensif du diabète en cas de diabète de type 1 ont exigé que beaucoup de nouvelles forces s’associent. Ce rajeunissement a mené en 1994 à changer la dénomination de BVS en VDV (Vlaamse Diabetes Vereniging) et à rebaptiser la revue bimestrielle ‘Diabetes Info’. L’émission de ‘Levenslijnactie voor diabetes’ diffusée sur VTM en 1996 a suscité un vif intérêt pour cette maladie auprès du grand public, a permis la création de la ligne Info-Diabète gratuite qui offre aujourd’hui encore un soutien téléphonique aux membres comme aux non-membres et a donné un nouveau souffle à la recherche scientifique sur le diabète en Belgique. Lorsqu’en 1998, l’étude UKPDS a été publiée sur le besoin d’un traitement intensif des personnes souffrant de diabète de type 2, l’intérêt s’est subitement accru pour ce groupe, qui représente 90% de la population de personnes souffrant de diabète.
Pour des raisons évidentes, depuis le début du 21e siècle, les médecins de famille – maillons indispensables dans l’accompagnement des patients de type 2 – sont impliqués dans la création du Zorgtraject (Trajets de soins) qui octroie depuis 2009 une aide financière et éducative aux personnes souffrant de diabète de type 2. De même, le projet national pour le pied du diabète et le diabète gestationnel sont des piliers importants de la prise en charge du diabète. Au rang des défis les plus récents que le VDV et l’ABD entendent relever, épinglons la fourniture d’informations sur les nombreux nouveaux moyens de traitement du diabète de type 2. Depuis 2014, le VDV s’est vu rebaptiser ‘Diabetes Liga’. Comme par le passé, son rôle reste d’offrir une aide aux personnes de plus en plus nombreuses atteintes de diabète tant au niveau éducatif que social et psychologique.
Prof. Em. Dr. Raoul Rottiers ©